Mannequin 01.
"Mannequin 01", 2010, acrylique sur toile, 35 x 27 cm.
« Lorsque sa kermesse publicitaire s'accapare tous les organes de pression de la planète, c'est la compétition des marques et des drapeaux, le mérite du gagnant par les sacrifices des perdants, l'admiration du travail et de la souffrance, la gloire du vainqueur et la mystification du champion, la célébration de la guerre économique, le grand spectacle du capitalisme maître du monde, que l'on accepte et vénère dans la soumission contemplative d'un monde d'apparences complètement malade et maintenant suicidaire. » Raoul Vaneigem.
Révélation de grande surface.
La peinture intitulée "Mannequin 01", a été peinte d’après une photo d’un mannequin inconnu, reproduite dans un magazine de mode français des années 70.
Les mannequins défilent ou s'exposent pour valoriser les produits de l'industrie de la mode. Ils sont employés principalement pour la promotion de l’habillement, des accessoires de mode et des produits de beauté. Les modèles de haute couture sont souvent d'une grande beauté et possèdent des traits physiques rares, prononcés et singuliers propres à émouvoir les plus grands photographes qui vantent leur photogénie dans les magazines de mode.
« Le merveilleux nous enveloppe et nous abreuve comme l’atmosphère ; mais nous ne le voyons pas. » Charles Baudelaire (1).
Dans une maison l’électricité apporte la lumière et la chaleur en remplacement des anciens combustibles comme l’étaient le bois, le charbon, le mazout et le gaz butane ou propane pour le chauffage, et la cire ou l’huile ainsi que le gaz de ville pour l’éclairage. Nous avons besoin de cette énergie extérieure pour vivre nuit et jour, dans la lumière et la chaleur. Nous avons également besoin d’y voir clair à l’intérieur de nous. Parfois cet éclairage est spirituel et révolutionnaire et nous emporte vers la liberté, l’égalité et la fraternité, comme celui qui a éclairée le grand siècle des lumières. Rien que d’y penser cela fait chaud au cœur !
Une autre énergie nous meut, elle nous anime entièrement, elle s’appelle l’Energie vitale. Savez-vous que notre état de santé général, psychique et physique, est essentiellement conditionné par la circulation de l’énergie dans notre corps. Cette énergie, dont l’approche est familière aux philosophes et thérapeutes ainsi qu’aux chamans, c’est l’énergie de la vie, commune au monde vivant. Cette énergie serait sexuelle autrement appelée "libido" (2). Dans les sociétés animales, il existe des périodes de libido intense au printemps, en automne, selon les lunaisons, etc. Ces périodes sont appelées chaleurs chez les femelles et rut chez les mâles. Pour l’espèce humaine, rien de tel, elle jouit d’une appétence et d’une disponibilité sexuelle exceptionnelle. Cette énergie entièrement disponible se mobiliserait en pulsions évidemment canalisables, contrôlables par chacun dans la mesure d’en prendre conscience (désir) pour en faire un plaisir (maîtrise). La libido (le désir en latin) désigne ce désir sexuel autrefois appelé "appétit sexuel" par le philosophe néerlandais marrane Baruch Spinoza (1632-1677) (3).
La libido ne change jamais, c’est son expression qui varie.
Avec la peinture intitulée "Mannequin 01", j’évoque une façon dont l’imagerie est utilisée pour exploiter cette énergie et succiter des achats. Là ce n’est pas le mannequin qui est à acheter mais ses apparences : son maquillage, sa coiffure, ses gants ses boucles d’oreilles, pour acquérir un plus d’énergie libidinale dans la vie de tout les jours ou dans une occasion particulière des relations sociales par rapport à la concurrence dans la course à la reproduction de l’espèce. Chez la femme, la libido maximale est atteinte 14 jours après les règles (milieu du cycle) c’est l’oestrus, moment de sécrétion maximum d’hormones femelles. Chez l’homme, la libido, quasi permanente, est la résultante des stimuli intérieurs, fantasmes, pulsions, mais aussi des stimuli extérieurs, vues, toucher, odorat, phéromones... La nature a sélectionné au cours de quelques millions d’années d’évolution, les êtres les plus "libidineux" (au sens propre du terme). Cette force ou énergie pulsionnelle entrant bien souvent en conflit avec les conventions et le comportement conformiste propre au mode de vie des sociétés de type "civilisé", faites d’institutions pratiquant la censure ou provoquant l’autocensure. Le blasphème comme expression de la censure religieuse a été abolie en France par la Révolution française en 1792.
« La libération sexuelle n’est qu’apparente dans la société actuelle. (...) Le sexe, suscité et réprimé, orienté et exploité sous les formes innombrables de l’industrie matérielle et culturelle, est absorbé, institutionnalisé, administré par la société - pour mieux le manipuler. » Theodor Ludwig Wiesengrund Adorno (1903-1969) (4).
Jean-Bernard Pouchous - 2011.
Bibliographie :
-1- Charles Baudelaire, Le Spleen de Paris, éd. Librio, collection Poésie, 2004.
-2- Karl Abraham, Dalint, Klein, Reich, Les stades de la libido, de l’enfant à l’adulte, éd. Sand et Tchou, collection Les grandes découvertes de la psychanalyse, 1997.
-3- Baruch de Spinoza, André Lécrivain, Traité de la réforme de l’entendement : Tractatus de intellectus emendatione : Et de la meilleure voie à suivre pour parvenir à la vraie connaissance des choses, éd. Garnier Flammarion Philosophie, 2003.
-4- Theodor Ludwig Wiesengrund Adorno, Tabous sexuels et droit - aujourd’hui, éd. Payot, collection Modèles critiques. Interventions-répliques, 1984.