René Magritte - La Lectrice soumise.
"D'après René Magritte - La Lectrice soumise", 2018, acrylique sur toile, 35 x 24 cm.
« On ne choisit pas un livre, c’est lui qui vous choisit.» Carlos Ruiz Zafon.
Fascination.
La peinture intitulée " René Magritte, La Lectrice soumise ", a été peinte d’après une œuvre de René Magritte (1898-1967), "La Lectrice soumise ", (1928), huile sur toile, (92 x 73.5 cm.), conservée au musée du Louvre d'Abu Dhabi.
René Magritte peint une femme totalement soumise à une lecture, contrairement à ses fréquentations surréalistes ultérieures, notamment Dalí qui en tant que surréaliste cherchent à libérer l'inconscient, il sera toujours opposé, pour ne pas dire résistant, à la psychanalyse. L'art n'ayant pas besoin selon lui d'interprétations psychanalytiques mais de commentaires. L'inconscient de l'artiste ne saurait donc jamais convoquée pour comprendre ses productions. Sigmund Freud (1856-1939) écrit à Stefan Zweig (1881-1942) le 19/07/1938 : « J’étais jusque-là enclin à considérer les surréalistes, qui semblent m’avoir choisi pour saint patron, comme des fous absolus (disons à 95% […]). », mais il change d’avis devant l’incroyable technique et l’intérêt analytique de l’œuvre de Salvador Dali (1904-1989) qui venait de lui être présenté.
Né à Lessines en 1898 dans le Hainaut, au sud de la Belgique, René Magritte s’installe à Bruxelles en 1915, un an après le suicide de sa mère, retrouvée noyée, une chemise lui masquant le visage. Son souvenir est sans doute à l’origine de nombreuses peintures où Magritte présente des figures voilées. Jeune, il s’intéresse particulièrement aux aventures de Zigomar, Buffalo Bill, Texas Jack, Nat Pinkerton, des Pieds Nickelés, et se passionne à partir de 1911 pour le personnage de Fantômas. À l’Exposition universelle de Charleroi, il découvre la même année le cinéma, il est impressionné par les affiches des films mais également par les images publicitaires et la photographie (1). Après des études à l’Académie des Beaux-arts de Bruxelles de 1916 à 1918, il est employé comme dessinateur dans une usine de papier peint. En 1925, la découverte de l’œuvre de Giorgio De Chirico (1888-1978) l’incite à adopter une facture réaliste pour représenter des objets quotidiens comme des chaussures, des clés … organisés selon des rapports formels déroutants et dans des situations invraisemblables. En 1926, en compagnie des poètes Marcel Lecomte (1900-1966), Camille Goemans (1900-1960) et E.L.T. Mesens (1903-1971), il fonde le groupe surréaliste belge, avant de rejoindre pour trois ans, à Paris, le groupe d’André Breton (1896-1966). De retour à Bruxelles en 1931, il devient le chef de file du Surréalisme en Belgique. « Le mot "surréalisme" ne signifie rien pour moi », déclarait Magritte, il se distingue du surréalisme français par une certaine remise en cause de l'automatisme, la revendication d'une musique surréaliste, et l’humour et la dérision en sont ses marques de fabrique (2).
La peinture de Magritte s’interroge sur sa propre nature, et sur l’action du peintre sur l’image. La peinture n’est jamais une représentation d’un objet réel, mais l’action de la pensée du peintre sur cet objet. Magritte réduisait la réalité à une pensée abstraite rendue en des formules que lui dictait son penchant pour le mystère : « Je veille, dans la mesure du possible, à ne faire que des peintures qui suscitent le mystère avec la précision et l’enchantement nécessaire à la vie des idées », déclara-t-il. Son mode de représentation, qui apparaît volontairement neutre, académique, voire scolaire, met en évidence un puissant travail de déconstruction des rapports que les choses entretiennent dans la réalité. Magritte excelle dans la représentation des images mentales. Pour Magritte, la réalité visible doit être approchée de façon objectale. L’élément essentiel chez Magritte, c’est son dégoût inné de la peinture plastique, lyrique, picturale. Magritte souhaitait liquider tout ce qui était conventionnel ; « L’art de la peinture ne peut vraiment se borner qu’à décrire une idée qui montre une certaine ressemblance avec le visible que nous offre le monde »
En 1973, Michel Foucault (1926-1984) lui consacre son célèbre essai Ceci n’est pas une pipe (3). Peintre de la métaphysique et du surréel, Magritte a traité les évidences avec un humour corrosif, façon de saper le fondement des choses et l’esprit de sérieux. Il s’est glissé entre les choses et leur représentation, les images et les mots.
« Magritte est un grand peintre, Magritte n’est pas un peintre », 1947, Louis Scutenaire (1905-1987).
Jean-Bernard Pouchous.
Bibliographie :
-1-Magritte, Marcel Paquet, Editeur : Taschen, 1976.
-2- Paul Aron et Jean-Pierre Bertrand, Anthologie du surréalisme belge, Editeur : ESPACE NORD, 2015.
-3-Michel Foucault, Ceci n’est pas une pipe, Editeur : Fata Morgana, 1973.