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18-DECAMETRE


"Décamètre", 2006, acrylique sur toile, 80 x 40 cm.

« L’adresse est faible en face de la nécessité. » Eschyle (-526 à -456) (1).


Marignan.

STOP, cette peinture intitulée "Décamètre", représente un ruban de mesure gradué, il fait partie de ma panoplie d’outils. Si nous regardons bien les indications imprimées sur le ruban en plastique du décamètre, au niveau du trait 15 mètres et 15 cm nous lisons "Marignan".

Quand j’étais étudiant à Grenoble j’allais souvent regarder, place saint André, la statue du "chevalier sans peur et sans reproche" Pierre Terrail seigneur de Bayard, appelé Bayard (1476-1524) (2).

1515, Marignan (3).

La bataille de Marignano en Italie eut lieu les 13 et 14 septembre 1515 et oppose François 1er (1494-1547) (4) et ses alliés vénitiens aux Suisses qui défendent le Milanais. Face à lui, une coalition s’est formée avec le pape Léon X Giovanni di Lorenzo de Medici, le duc de Milan Ercole Massimiliano Sforza (1493-1530), l’empereur du Saint-Empire Maximilien Ier de Habsbourg (1459-1519) et le roi Ferdinand II d’Aragon (1452-1516).

Le moral des troupes est bon, l’armée considère la jeunesse du roi de France, comme un gage de victoire.

L’artillerie est l’atout numéro un des Français. Elle est la première d’Europe, avec ses 60 canons de bronze. Sachant les passages habituels des Alpes, gardés par les troupes du pape, les lourds canons sont hissés avec des treuils pour franchir les cols par des sentiers à chèvres, comme le col de l’Argentière, du côté de Montgenèvre.

À Marignan, à 16 km au sud-est de Milan dans la plaine du Pô, les troupes suisses, attaquent les lansquenets qui protègent l’artillerie. Les trois carrés de piquiers les font plier mais le roi, qui n’a pas eu le temps de mettre son armure dont le cuir a été déchiré par un coup de pique, vient les rallier. Le chevalier Bayard, se bat avec une grande bravoure. Son cheval est tué sous lui. Il se remet en selle aussitôt. Les brides sectionnées, sa seconde monture s’emballe et l’entraîne vers les rangs suisses. Il parvient à se sauver et regagne son camp à travers les vignes. Les troupes tiennent jusqu’à minuit, puis le combat s’arrête. Au petit matin du 14, le combat reprend.

L’artillerie française fait des ravages mais l’aile gauche de l’armée, fléchit. Soudain, un cri retentit « Marco ! Marco ! ». Ce sont les Vénitiens. À 11 heures, les "Suisses" au service du pape, battent en retraite vers Milan. Le soir, 14.000 Suisses gisent sans vie sur le champ de bataille, où François Ier. est fait chevalier par Pierre du Terrail, seigneur de Bayard. Une bataille célèbre à l’aube d’un long règne, elle aura duré deux jours, fait inhabituel pour l’époque et est devenue un symbole de l’histoire de France.

Nous sommes au début de la Renaissance, le génie italien de l’époque s’ouvre à l’Europe. En décembre le roi rencontre à Bologne celui qui incarne l’esprit universaliste de la Renaissance dont il reste un des représentants majeurs et demeure à jamais l’un des plus grands : Léonard de Vinci (1452-1519) (5). Le peintre est alors considéré comme un homme de science de génie multidisciplinaire et prolifique, homme d’esprit universel, à la fois artiste, scientifique, inventeur et philosophe humaniste. C’est en 1516 que le "polymathe" le plus célèbre du monde part travailler en France, où son nouveau mécène et protecteur, le roi de France l’installe au "Clos Lucé" prés d’Amboise (Indre et Loire) en tant que premier peintre, ingénieur et architecte du roi. François Ier. est fasciné par Léonard et le considère comme un père.

A cette époque Michel Ange (1475-1564) (6), conçoit et sculpte de ses mains l’ouvrage exceptionnel du tombeau de Laurent II de Médicis (1492-1519), fils de Pierre II de Médicis (1471-1503), père d’Alexandre le Maure (1510-1537) et de Catherine de Médicis (1519-1559), mère de François 1er.

Machiavel (1469-1527), dédicaça au Médicis son célèbre traité "Le Prince" (7).

Léonard de Vinci a apporté dans ses malles ses œuvres les plus célèbres tels "La Vierge aux rochers" (1483/1486), "L’Enfant Jésus et Sainte-Anne" (v. 1500), "La Joconde" (8) (1503-06), le "Saint Jean-Baptiste" (1513-16) ... toutes conservées actuellement au Louvre. En 1519, malade depuis de longs mois, Léonard de Vinci est emporté par la maladie le 2 mai, au clos Lucé, à l’âge de 67 ans. Giorgio Vasari (1511-1574) (9), son premier biographe, prétend qu’il serait mort dans les bras du roi François 1er.

A la question des motivations artistiques le maître répondait : "Causa mentale". Deux mots marquants de l’humanisme (10) et des balbutiements de l’intellectualisme et de l’individualisme (11).

Dans la peinture intitulée "décamètre", la représentation d’un panneau STOP est inspirée d’un accessoire récupéré sur le tournage d’un de mes films intitulé "PLEIN-VIDE". C’est un panneau de signalisation routière, qui est habituellement planté au niveau des bifurcations ou des croisements et qui informe les artistes qu’ils doivent marquer l’arrêt à 15m.15, avant de poursuivre. Au-delà de l’obligation pour un artiste de marquer l’arrêt, ce panneau signifie que, quelle que soit la direction qu’il souhaite prendre, il n’est jamais prioritaire: Il doit laisser la priorité aux autres artistes déjà présents sur cette route. En cas d’infraction il sera pénalisé d’un retrait de permis de conduire son art de 15 mois et 15 jours appelé un "marignan". Les interdits sont les éléments médiateurs entre sacré et profane. Ils énoncent ce qu’il ne faut pas faire et non pas ce qu’il faut faire. La transgression d’un interdit est, ça va de soi, interdite. L’acte d’introduire un ou des éléments de l’ordre du profane à l’intérieur d’une enceinte consacrée (de façon réelle ou symbolique) est nommé profanation, ce qui est un sacrilège pour tout croyant.

« Les choses sacrées sont celles que les interdits protègent et isolent, et les choses profanes étant celles auxquelles ces interdits s’appliquent et qui doivent rester à l’écart des premières. La relation (ou l’opposition, l’ambivalence) entre Sacré et Profane est l’essence du fait religieux. » Emile Durkheim (1858-1917) (12).

Jean-Bernard Pouchous – 2008.

Bibliographie :

-1- Eschyle, Théâtre complet, éd. Flammarion, coll. Garnier Théâtre étranger, 1993.

-2- Jean-Silve de Ventayon, Bayard - chevalier sans peur et sans reproche, éd. Fernand Lanore, 2001.

-3- Didier Le Fur, Marignan : 13-14 septembre 1515, éd. Librairie Académique Perrin, 2004.

-4- Sylvie Le Clech, François 1er : Le roi-chevalier, éd. Tallandier, coll. Divers, 2006.

-5- Sophie Chauveau, Léonard de Vinci, éd. Gallimard, coll. Folio Biographies, 2008.

-6- Irving Stone, Janine Michel, La Vie ardente de Michel-Ange, éd. Plon, 1983.

-7- Nicolas Machiavel, Le Prince, éd. LGF - Livre de Poche, coll. Classiques Philosophie, 2000.

-8- Cécile Scailliérez, Léonard de Vinci : La Joconde., éd. RMN, coll. Slo, 2003.

-9- Giorgio Vasari, Véronique Gerard- Powell, Léopold Leclanché, Charles Weiss, Vies des artistes : (Vies des plus excellents peintres, sculpteurs et architectes), éd. Grasset & Fasquelle, coll. Les cahiers rouges, 2007.

-10- Christine Bénévent, L'humanisme, éd. Gallimard-Education, coll. La bibliothèque,2007.

-11- Emile Durkheim, L’individualisme et les intellectuels, éd. PUF, coll. Quadrige Grands textes, 2008.

-12- Emile Durkheim, Les formes élementaires de la vie religieuse, éd. Phaidon, coll. 55, 2001.

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