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GRENOUILLES


"Grenouille jaune", 1992, 54 x 65 cm. ; "Grenouilles bleues", 1989, acrylique sur toile, 50 x 50 cm.

Les Amours jaunes :

« Un chant dans une nuit sans air

- La lune plaque en métal clair

Les découpures du ven sombre

Un chant, comme un écho,

tout vif Enterré, là, sous le massif

- Ça se tait Viens, c’est là, dans l’ombre

- Un crapaud! - Pourquoi cette peur,

Près de moi, ton soldat fidèle !

Vois-le, poète tondu, sans aile,

Rossignol de la boue - Horreur! ­

­II chante - Horreur!! - Horreur pourquoi

Vois-tu pas son “, il de lumière

Non” il s’en va, froid, sous sa pierre

Bonsoir- ce crapaud-Ià c’est moi. » Le crapaud. Tristan Corbière (1845-1875) (1).

« Causa sui » Marcel Conche (1922-…) (2).


Clapotis.

Depuis longtemps et souvent je peins des grenouilles et des crapeaux comme "Grenouille jaune" et "Grenouilles bleues" ; j’y retrouve toujours une certaine analogie avec la morphologie humaine. Je crois en une âme, une force vitale, qui animerait les êtres vivants comme les pierres et le vent. L’animisme se conçoit mieux comme une façon de voir le monde, présente de tout temps dans l’esprit humain. A Hermopolis, ville égyptienne du dieu de l’écriture Thot, Amaounet autrement appelée "La cachée" avait une tête de grenouille. Déesse égyptienne des mères ou de la fertilité, Amaounet est apparue aux origines des temps, elle représentait initialement le vent qui ne peut être vu mais qui peut être senti. Au Japon, l’on dit que la grenouille retourne toujours à son point de départ, même si on l’éloigne. Le mot japonais « kaeru » signifie aussi retourner. Elle est devenue une sorte de protecteur des voyageurs. Certaines personnes portent en guise d’amulette l’image d’une grenouille appelée la "grenouille remplaçante", c’est-à-dire que cette grenouille se substitue à l’homme qui est son propriétaire, s’il survient un sinistre quelconque. Une poésie, peut-être la plus connue au Japon, résume ce symbolisme :

« Le vieil étang ! Une grenouille y plonge : Ah ! Quel clapotis !… » Bashô (1644-1694) (3).

Pourtant les sacrifices de batracien existent, comme tout sacrifice, ils ont quatre fonctions précises:

- divinatoires, ils veulent interpréter un acte passé ;

- identitaires, ils aident à établir des liaisons entre le monde des hommes et celui des dieux;

- purificatoires, ils nettoient l’individu des souillures des fautes et des interdits;

- rites de passage, ils servent à initier, à préserver et à placer tout individu dans une fonction nouvelle.

Sacrifions la grenouille:

Oh! Grenouille! OH! GRENOUILLE, écoute dis moi : Quand est-ce que je serais riche et célèbre?

Oh! Grenouille! Suis-je un artiste aussi talentueux que mes Maîtres ?

OH! GRENOUILLE, purifies-moi de toutes les coassements que j’ai pu faire pour être artiste!

Oh! Grenouille! Maintenant, l’artiste te vénère, oh, grenouille...

Paf, d’un coup de hachoir, je tranche en deux le batracien et paf, j’aplatis et paf, j’écrase les restes immolés du plat de l’acier tranchant sur l’autel de l’incantation. Que vois-je : La réponse (?). A ma plus grande stupéfaction, sur le marbre blanc du sacrifice, sur le support de lecture de l’oracle, toute cette bidoche écrabouillée devint aussi éloquente qu’elle était sanguinolente en formant en 3 lettres majuscules le mot "NON". Depuis je regrette beaucoup d’avoir gaspillé toute cette énergie, mon temps et mon argent à des "cruauteries" pareilles.

Jean-Bernard Pouchous - 2008.

Bibliographie :

-1- Tristan Corbière, Les Amours jaunes, Le crapaud, éd. Flammarion, coll. Poésie, 1973.

-2- Marcel Conche, De l'amour : Pensées trouvées dans un vieux cahier de dessin, éd. Cécile Defaut, 2008.

-3- Matsuo Bashô, Cent onze haïku, éd. Verdier, coll. Poésie, 1998.

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