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MICTIONS COLOREES.


4 dessins, "Sexe danse", "Cà habite", "La roue tourne", "Cà danse", 1972, mine de plomb et crayon de couleur sur papier , 70 x 50 cm.

« L’émotion est la supra-intelligence, situé non au-dessus du cerveau mais au-dessus du corps. » - Luis Ansa (1).


Boite de Petri.

Ainsi, dans le laboratoire paternel, j’appris par la pratique que la cellule est l’unité constitutive des organismes vivants et qu’elle en est aussi l’unité fonctionnelle. La multiplication des cellules permet le maintien des organismes et leur multiplication, la cellule est unité de vie, tout ce qui est vivant est cellulaire. J’appris également que les bactéries, sont présentes partout. Elles peuvent être isolées du sol, des eaux douces, marines ou saumâtres, de l’air, des profondeurs océaniques, de la croûte terrestre, sur la peau et dans l’intestin des animaux. Il y a quarante millions de cellules bactériennes dans un gramme de sol et un million de cellules bactériennes dans un millilitre d’eau douce. En tout, il y aurait cinq quintillions (5 x 1030) de bactéries dans le monde. Cependant, un grand nombre de ces bactéries ne sont toujours pas caractérisées car non cultivables en laboratoire (2).

Ce monde biologique microcosmique resurgit de mon esprit, en 1972 et je l’utilisais artistiquement, comme un moyen de comprendre le milieu culturel dans lequel je commençais à évoluer alors. J’allais fabriquer des bouillons de culture avec mes crayons de couleur sur du papier, comme on le faisait avec les produits et liquides qui étaient distribués en "boite de Petri" ou "tube à essais" et destiné à obtenir une croissance rapide du micro-organisme à étudier.

Je dessinais donc un personnage cellule comme une unité spatiale caractéristique, délimitée par une membrane. Celle-ci, loin d’être une limitante hermétique, constituait une surface d’échanges permettant la mise en place de flux. La membrane agit non seulement comme un filtre, elle permet aussi le passage de la lumière, de la chaleur... En tant que surface de contact avec l’extérieur, elle assure aussi la transmission d’informations nécessaires à la réactivité de la cellule aux changements de l’environnement et à la coordination avec d’autres cellules. Mes cellules personnages avaient une forme plus têtard qu’humanoïde, plates cernées d’une membrane qui créait un espace clos en constant échange avec l’environnement proche.

Cette structure de base m’a permis la mise en place et le maintien de flux de matière, d’énergie, d’information... traversant la cellule.

Il y a donc dans cette miction, une réelle organisation des échanges cellule et extérieur, qui va permettre au "système cellule" (au sens thermodynamique) de maintenir sa structure hautement organisée. Il faut bien reconnaître que la cellule ne constitue pas une structure stable et immuable mais plutôt une entité dynamique nécessitant un apport constant de matière et d’énergie pour permettre son fonctionnement et le maintien de sa structure. Seule son organisation persiste, ses constituants étant en perpétuel renouvellement. Bien entendu, cette structure résulte de l’expression d’un programme génétique (artistique). Celui-ci doit être transmis de dessein en dessin, en même temps que la structure de base, au cours des divisions cellulaires. Les dessins: "Sexe danse", "Cà habite", "La roue tourne", "Cà danse" sont les résultats de ses recherches bio-artistiques.

Dans la réalité, la cellule est considérée non seulement comme l’unité structurelle du vivant mais aussi comme un vecteur de gènes assurant leur transmission au fil des générations. La cellule permet un brassage génétique au sein de la population grâce aux processus cellulaires de multiplication et la fécondation. Il existe deux types de divisions cellulaires dans le monde vivant : la "mitose" qui assure la naissance de cellules identiques à la cellule mère lors de la multiplication asexuée et la "méiose" qui aboutit à la production de cellules sexuelles ou "gamètes" pour la reproduction (3). Pour ma part, j’optais dans mes expériences dessinées pour une conception libidinale du sujet ou plutôt j’adoptais un concept plus général d’énergie créatrice comme le système de reproduction sexuée de mes cellules souches (cellules personnages). Ce système basé sur le coït me permis d’exprimer toutes sortes d’expériences et de démontrer le vécu le mes recherches dans la communication de résultats graphiques puis plastiques, originaux.

« Nous ne voulons point troquer ce que tu appelles notre ignorance contre tes inutiles lumières. » Denis Diderot (1713-1784) (4).

Le psychanalyste Sándor Ferenczi (1873-1933) (5) est l’un des premiers psychanalystes à revendiquer cette fonction. Dans "Thalassa", il décrit l’opération psychique appelée introjection comme l’inverse de la projection. L’introjection est un mode identificatoire particulier, consistant en l’intériorisation de traits et de qualités du monde extérieur en soi, sans considération de frontière dedans/dehors: « L’homme ne peut aimer que lui-même et lui seul, aimer un autre équivaut à introjecter cet autre dans son propre moi.»

Ferenczi s’intéresse au coït comme métaphore du retour dans le ventre maternel. Il comprend la grossesse comme stade de toute-puissance réelle pour le nourrisson, comme époque où tous les désirs sont immédiatement satisfaits, d’où l’idée que, par la suite, l’adulte fantasmera un retour dans le ventre de la mère.

Dans le coït, le retour s’effectuerait de trois manières : Il y a retour imaginaire dans le ventre : l’homme rentre dans le ventre au niveau du fantasme, lequel s’avérerait déterminé par une situation, réelle, de plaisir antérieur. Le fantasme vise à la répétition d’une expérience de satisfaction, si l’on veut historique.

Au niveau du phallus, il y a un retour symbolique dans le ventre.

Dans le discours, qui se montre sans ambiguïté, il y a pénétration.

De même que le psychanalyste Jacques Lacan (1901-1981) (6) précisera que la castration est symbolique - puisque, dans le réel, il ne manque rien au sexe de la femme, de même la pénétration n’est pas réelle. Ce qui serait visé ne serait pas tant l’utérus que l’intérieur. Quant au sperme, il y a bien pénétration du ventre, ce qui se situe donc au niveau réel. Il y aurait identification à la semence en ce qu’elle a le privilège d’atteindre la situation intra-utérine. Le sperme formerait alors un alter ego narcissique.

Ferenczi dévoile ces trois structures, pour montrer comment, d’une part, le symbolisme est au service de l’imaginaire, et d’autre part comment l’identification à un objet réel, elle aussi, étant au service du fantasme.

On remarque également comme l’originaire se trouve indissociable de ces structures, organisateur qu’il est de l’ensemble de la vie fantasmatique.

En français, avant les découvertes de la psychanalyse deux mots existaient : "phantasme", synonyme d’hallucinations, et "fantaisie", qui signifiait entre autre la capacité à imaginer. Les premiers traducteurs des textes de l’auteur de "Le mot d'esprit dans sa relation à l'inconscient", Sigmund Freud (1856-1939) (7) ont choisi de traduire le mot allemand "phantasie" par un mélange de ces deux termes : “fantasme”. Dans le domaine de la sexualité, le fantasme est la représentation mentale d’images ou d’idées provoquant une pulsion ou une excitation sexuelle. Pour l’anthropologue, psychologue et épistémologue américain Gregory Bateson (1904-1980) (8), le fantasme est une activité ludique imaginaire d’un jeu théâtral où chacun est à la fois l’auteur, l’acteur et le metteur en scène (9). Le "passage à l’acte" est la réalisation matérielle d’un fantasme. Il y a toute sorte de phantasme. Il y a toute sorte de passage à l’acte. La capacité à fantasmer signerait finalement une certaine "normalité psychique".

« Le névrosé construit des châteaux en Espagne, le psychotique les habite et le pervers encaisse le loyer. » Blague psy.

La "névrose" est un ensemble de troubles mentaux qui résulte de traumatismes vécus dans l’enfance ou de répressions des émotions, des sentiments, de l’expression, de la sexualité, qui sont refoulés et intériorisés. Dans nos sociétés occidentales, il n’y a guère d’individu qui ne soit au moins affecté de névrose à un degré divers. Celle-ci touche toutes les classes sociales. A la fin du XX e. siècle, l’organisation mondiale de la santé, OMS, avance que 25% des individus seraient touchés.

Le médecin, psychiatre et psychanalyste Wilhelm Reich (1897-1957) (10) parlait à ce propos de "peste émotionnelle". Cherchant à savoir si la "libido" hypothèse fondamentale de la psychanalyse de Freud est ou non une énergie réelle, il inventa l’ "Orgone", une « énergie cosmique fondamentalement nouvelle, obéissant à des lois fonctionnelles et non mécaniques, omniprésente …» et même la machine pour en mesurer la puissance chez l’individu.

« La religion serait la névrose obsessionnelle universelle de l'humanité; comme celle de l'enfant, elle dérive du complexe d'Oedipe, des rapports de l'enfant au père » Sigmund Freud (11).

Jean-Bernard Pouchous - 2009.

Bibliographie :

-1- Luis Ansa, Henri Gougaud, Le quatrième royaume, éd. du Relié, coll. Poche, 2007.

-2- Laurent Degos, Mon corps : Cent mille milliards de cellules éd. Le Pommier, coll. les Minipommes, 2005.

-3- Marie-Hélène Grosbras, André Adoutte, Jean-Jacques Perrier, Jean-Louis Serre, La biologie : En 18 mots-clés, éd. Dunod, coll. Culture Science, 2009.

-4- Diderot, Oeuvres, Denis Diderot, éd. Gallimard, coll. Bibliothèque de la Pléïade, 1946.

-5- Sándor Ferenczi, Thalassa, Psychanalyse des origines de la vie sexuelle, éd. Payot, coll. Petite bibliothèque, 1992.

-6- Élisabeth Roudinesco, Jacques Lacan : esquisse d'une vie, histoire d'un système de pensée, éd. Fayard, 1994.

-7- Sigmund Freud, Le mot d'esprit dans sa relation à l'inconscient, éd. Gallimard, 1974.

-8- Gregory Bateson, Vers une écologie de l’esprit, tome 1 et 2, éd. Seuil, coll. Point Essais, 2008.

-9-Paul-Laurent Assoun, Leçons psychanalystiques sur le Fantasme, éd. Anthropos, coll. Psychanalyse Poche, 2007.

-10-Wilhelm Reich, Ecoute, petit homme, éd. Payot, 2001.

-11-Sigmund Freud, L'Avenir d'une illusion, éd. PUF, 2004.

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